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Présentation de la
société
Les
littératures de l'ere coloniale
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Traces
d'un temps
[ 1/22]
Jean
Arrouye
Dans
La
Sirène de Torrente Ballester le narrateur allant voir son
cousin Alfonso
qu'il n'a jamais rencontré, pendant les
« quatres heures d'isolement et de
secousses » du voyage en train de Madrid
à Cuenca, imagine de transposer
la situation d'Alfonso en pièce de
théâtre ou en roman et, comparant en
pensée
ces deux oeuvres possibles, conclut : « Pas de
doute, le roman avait beaucoup
plus d'effet ! Tout tenait dans ses
parenthèses » [1]. Ces
parenthèses, ainsi dénommées parce
qu'elles sont les parties du texte qui
interrompent le strict récit des relations des trois
personnages impliqués dans
l'intrigue, sont les descriptions qui permettent de
présenter ceux-ci et de
faire connaître au lecteur la nature du lieu où se
déroule l'action.
Cette action est la libération, par « une
fille moderne et
courageuse », d'Alfonso, « un
homme faible et sensible », de
l'influence néfaste de sa mère qui le domine et
le maintient dans un état de
dépendance qui tourne à la névrose.
Lucidement le narrateur se rend compte que
cette intrigue reprend un vieux schéma narratif et
dramatique : celui de
l'histoire édifiante de Saint Georges (en jupon, ici)
libérant la victime d'un
dragon (une mère castratrice, en l'occurrence). On comprend
alors pourquoi les
parenthèses sont si essentielles : si l'intrigue n'est
qu'une variation sur un
air connu, c'est sa reformulation en termes contemporains et son
ancrage
référentiel dans un milieu
particulièrement caractérisé qui
confèreront à la
vieille histoire un intérêt nouveau. Cela suppose
des descriptions
circonstanciées.
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