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Présentation de la
société
Les
littératures de l'ere coloniale
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Le pari de
Mouloud Feraoun : une littérature régionale
à la croisée des chemins de l'histoire
[1/ 13]
Samirah
Sayeh , Penn
State University (USA)
Dans
l'Algérie de la fin des
années 1930, Mouloud Feraoun (1913-1962), un jeune
instituteur
kabyle ayant
bénéficié du
système éducatif
français, éprouve soudain le besoin de
mêler sa
voix au concert de voix impérialistes et d'en modifier le
refrain.
Suite à la publication de son premier roman
autobiographique, Le
Fils du
pauvre [1]
(1950), l'auteur kabyle
rompt avec une certaine idée de «
littérature coloniale ». Car comme le
remarquait encore Charles Autrand en 1953, et qui était
toujours de mise en
1950, « ce qui frappe [...] dans toute la production qui
couvre l'intervalle
1898-1935, c'est [...] l'extrême rareté des noms
indigènes [...] »[2].
De par la position «
privilégiée » de l'auteur,
qui est celle d'appartenir au groupe social qu'il
décrit
dans ses romans, le lecteur a enfin accès à un
monde qui fut jusque-là terré et
occulté sous les écrits exotiques et
romancés de ses prédécesseurs
d'origine
européenne. Pour la « première
fois »[3],
on est exposé à une écriture du
dedans. Dès
lors, parce que son oeuvre s'ancre au cœur
même du
terroir algérien de Grande Kabylie,
elle offre un documentaire précieux sur les coutumes, le
folklore, la terre et
la vie quotidienne au village dans la première
moitié du
xxe siècle.
Notes
[1] Le Fils du
pauvre, Paris,
Seuil,
1954.
[2] Monde paru
nouveau 73, 1953,
p. 35.
[3]Voir Jean Déjeux, Littérature
maghrébine de langue française
(Sherbrooke, Naaman, 1973). Dans le « panorama
rétrospectif » (pp. 11-46) Jean Déjeux
explique que
de nombreux textes d'auteurs indigènes furent effectivement
publiés bien avant Le
Fils du pauvre,
cependant, parce que les premiers textes ne faisaient que reproduire le
schéma des auteurs coloniaux de l'époque, ces
derniers ne
furent pas retenus.
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