Guy Riéger
Une très grande variété
caractérise la littérature sur le Maroc. En sont la cause la diversité des
publics visés et la qualité des auteurs, leur personnalité, leur métier, leurs
fonctions. Le moment joue êgalement un grand rôle On ne s'étonnera pas de
constater que les premiers grands textes à partir de 1875 émanent de
personnages ayant accompagné des missions diplomatiques à Meknès ou à
Fès, comme le Dr Beicher en 1875, G.Charmes en 1887 ( Une ambassade au Maroc)
ou P. Loti en 1889 (Au Maroc). Puis les explorateurs (Ch.de Foucault,
1888; R.de Segonzac, 1903), les voyageurs (A.Chevrillon), les chargés de
mission militaires ou scientifiques, (A.Moulieras, Doutté) ont ajouté leurs
témoignages aux leurs. Et c'est dès le début du XX°' siècle que commencent à
paraître les livres de vuigarisation sur le Maroc, comme par exemple celui
d'E. Aubin, Le Maroc d'auiourd'hui.
Mais ce sont les militaires, toujours en activité ou rendus
à la vie civile, qui fournissent le plus gros contingents d'auteurs pour
évoquer l'époque et les combats qui ont précédé I'installation du Protectorat
en 1912 (Gal. Deschamps, Cap.Azan, Cap.Granet, E.Nolly, P.Féline, M.Le Glay ou
P.Khorat). Ils sont moins nombreux, ou plus discrets, par la suite pour la
chronique de la Guerre du Rif ou des combats du Tafilalet (P.Bordes,
Paluel-Marmont, J.Fontelroye). Cependant les civils prennent le relais:
Bonnet-Devillers et Henriette Célarié rendent compte en journalistes de la
guerre du Rif en 1926 et 1929 et des romanciers vont s'en faire l'écho à leur
tour dans leurs oeuvres: A.Lety-Courbière, P.Nord, H. Bordeaux ou P. Mac
Orlan...Mais le grand livre sur la guerre du Rif reste le roman de l'écrivain
espagnol Ramon J.Sender, L'Aimant (1930)
Parmi les auteurs issus de I'armée, les légionnaires ne
sont pas les moins talentueux (G.Manue, J. des Vallières ou J.Martin). Quant
aux médécins militaires ils ne jouent pas seulement le rôle de héros de roman,
comme dans tel ouvrage de M Gieure ou de F.d'Authevllle (Sâadia,
qu'A.Lewin adaptera au cinéma en 1953,(avec M.Simon dans le rôle d'un chef de
tribu et J.Dufilho dans celui d'un bandit...). Ils ont pu se faire aussi les
chantres du "Maroc héroïque",comme le Capitaine-major, H.Vial, ou,
très tôt, des observateurs attentifs de la société marocaine (Dr Mauran, 1913,
Dr.P.Chatinières, 1919). L'expérience de leurs collègues civils avant 1956 ne
fut pas moins riche, si leurs témoignages sont plus tardifs, comme ceux des
docteurs H.Dupuch ou M.Rousselle.