Kusum Aggarwal
L’ouvrage
qui
eut un retentissement sans parallèle est sans doute La
philosophie bantoue
(1945) de Placide Tempels qui correspond à un désir de
s’interroger sur les
conditions susceptibles de contribuer à
l’évangélisation des peuples africains.
L’ouvrage repose en effet sur un paradoxe dans la mesure
où l’auteur démontre
l’universalité de la pensée philosophique et
proclame l’existence parmi les
Bantous d’un système de pensée cohérent,
ordonné selon un mode parfaitement accessible à
l’Occident, mais il leur dénie en
même temps le pouvoir d’une pensée autonome,
individuelle et réfléchie. Comme
pour Griaule, les Africains sont au mieux les dignes détenteurs
d’une sagesse
collective et spontanée dépourvue de la verve critique et
historique qui
caractérise la philosophie occidentale. Les spéculations
de Tempels réussissent
néanmoins à fournir aux futurs chercheurs une pierre
angulaire, comme le montre
les travaux d’Alexis Kagame et Louis Vincent Thomas.
L’africanisme des chercheurs et des savants européens
ne manqua pas de captiver l’imaginaire des africains. Souvent recrutés à titre
d’informateurs ou d’auxiliaires auprès des chercheurs occidentaux -on pensera à
Griaule et F.V. Equilbecq – ils accédèrent à l’africanisme également par des
pratiques de recherche encouragées dans le cadre scolaire, notamment à l’école
William Ponty. Moussa Traoré, de Dim Delobsom, Paul Hazoume, Maximilien Quenum
sont parmi les chercheurs notables mais celui qui le mieux illustra les
possibilités de l’africanisme est sans doute Amadou Hampâté Bâ dont l’œuvre
resitue la dialectique de la relation coloniale avec toutes ses contradictions.